Concepts clés sur les IG

Les indications géographiques

Les indications géographiques sont des signes distinctifs qui associent les produits de qualité et de renommée à leur lieu de production et qui, ainsi aident à identifier et à distinguer ces produits sur le marché.
Il existe plusieurs exemples célèbres de noms d’indications géographiques, qui sont associés à travers le monde, à des produits d’une certaine qualité, réputation et ayant une haute valeur commerciale. On pourrait citer des exemples tels que la liqueur Tequila (Mexique), les vins Bordeaux (France), le fromage Manchego (Espagne), le tabac Habanos (Cuba), le café d’Antigua (Guatemala), le thé Long-Ging (Chine), le cacao Chuao (Venezuela), le jambon de Parme (Italie), l’huile d’Argane (Maroc), le beurre de karité (Burkina Faso), l’ananas de Guinée, le miel blanc (Cameroun), la vanille Mananara (Madagascar), mais aussi les tapisseries Bukhara (Turquie), la coutellerie Solingen (Allemagne), les tapis Kilim (Turquie) ainsi que la soie thaïlandaise.

Selon l’article 22.1 des ADPIC, les IG sont «[…] des indications qui servent à identifier un produit comme étant originaire du territoire d’un Membre, ou d’une région ou localité de ce territoire, dans les cas où une qualité,réputation ou autre caractéristique déterminée du produit peut être attribuée essentiellement à cette origine géographique»[1]. La définition d’IG des ADPIC est très large, pouvant inclure des noms identifiant des produits agricoles et alimentaires, des produits artisanaux ainsi que des vins et des boissons spiritueuses. La condition fondamentale est que la qualité, la réputation ou d’autres caractéristiques spécifiques au produit en question soient liées à son origine géographique, en vertu par exemple du climat, du savoir-faire ou d’autres connaissances profondément enracinées dans un territoire donné. Le café de Colombie est une IG où le nom du pays renvoie à l’origine et à la qualité du produit. Les montagnes où sont cultivés les caféiers, la sélection de la variété du café, ainsi que les procédés de récolte et de transformation sont les facteurs qui confèrent au produit ces caractéristiques uniques[2].

Appellations d’origine

“Les appellations d’origine” renvoient à un signe qui informe qu’un produit est issu d’une région spécifique, mais cette appellation n’est limitée qu’aux cas dans lesquels les caractéristiques de qualité du produit sont dues à l’environnement géographique, tels que les facteurs humains et naturels de cette région, par exemple : le “Roquefort”, “le Gorgonzola” etc.

Une définition de ce concept se trouve dans l’Arrangement de Lisbonne concernant la protection des appellations d’origine et leur enregistrement international, adopté en 1958 dans le cadre de l’Organisation mondiale de la propriété intellectuelle (OMPI). Selon l’article 2.1 de l’Accord, une AO est « […] la dénomination géographique d’un pays, d’une région ou d’une localité servant à désigner un produit qui en est originaire et dont la qualité ou les caractères sont dus exclusivement ou essentiellement au milieu géographique, comprenant les facteurs naturels et les facteurs humains»[3]. L’article 2.2 définit le « pays d’origine » comme « celui dont le nom, ou dans lequel est située la région ou la localité dont le nom constitue l’appellation d’origine qui a donné au produit sa notoriété ». Trois éléments sont à souligner dans cette définition : Premièrement, l’exigence selon laquelle l’appellation d’origine doit être la dénomination géographique d’un pays, d’une région ou d’une localité signifie qu’elle doit être composée d’une dénomination qui identifie une entité géographique dans le pays d’origine.

Deuxièmement, l’exigence selon laquelle l’appellation d’origine doit servir à désigner un produit originaire du pays, de la région ou de la localité concernés signifie que, outre qu’elle doit identifier un lieu, la dénomination géographique en question doit être connue en tant que désignation d’un produit originaire de ce lieu (exigence de notoriété). La troisième exigence concerne la qualité ou les caractères du produit auquel l’appellation d’origine se rapporte, qui doivent être dus exclusivement ou essentiellement au milieu géographique du lieu d’où est originaire le produit. La mention du milieu géographique signifie qu’il doit exister un lien qualitatif entre le produit et le lieu d’où il est originaire. Le milieu géographique est déterminé d’une part par une série de facteurs naturels (tels que le sol et le climat) et d’autre part par une série de facteurs humains (par exemple, les connaissances ou les savoir-faire traditionnels en usage au lieu d’où le produit est originaire[4]).

Indication de provenance

“L’indication de provenance” fait référence à un signe qui indique simplement qu’un produit est originaire d’une région géographique spécifique, par exemple, les labels mentionnant : “Made in Germany “, “Produit aux USA” ou “Swiss-Made”.

Le terme “indication de provenance” est utilisé dans les articles 1 (2) et 10 de la Convention de Paris pour la protection de la propriété intellectuelle [5] et dans l’Arrangement de Madrid de 1891 concernant la répression des indications de provenance fausses ou fallacieuses sur les produits[6].Aucun des deux traités ne fournit de définition spécifique de l’indication de provenance. Toutefois, une clarification de la notion peut être trouvée dans l’article 1 (1) de l’Arrangement de Madrid:

«Tout produit portant une indication fausse ou fallacieuse par laquelle un des pays auxquels s’applique le présent de l’ Arrangement, ou un lieu situé dans l’un d’entre eux, serait directement ou indirectement indiqué comme pays ou comme lieu d’origine, sera saisi à l’importation dans chacun desdits pays».

Qualité, caractéristiques et réputation

Dans les définitions d’IG et d’AO, on retrouve les concepts de qualité, caractéristiques (ou caractères) et réputation (ou notoriété). Ces concepts se caractérisent de façon différente en fonction de l’histoire, de la culture et de la tradition de chaque pays. Néanmoins, dans un effort pour mettre en évidence les éléments communs à plusieurs traditions et cultures, la qualité d’un produit peut être définie par rapport à sa spécificité d’un point de vue nutritionnel, gustatif, visuel, symbolique ou par rapport à son mode de production. D’autre part,des caractéristiques liées à l’origine géographique d’un produit doivent être typiques de ce dernier,le différenciant de tout autre produit. Par exemple, elles peuvent être physico-chimiques,organoleptiques, naturelles, issues des matières premières utilisées, etc. Le concept de réputation se réfère à une opinion positive à propos d’un certain produit, qui peut se former au cours des années auprès des consommateurs et qui est liée à son origine géographique [7].

La zone géographique

Dans le processus de mise en place d’une IG, une étape fondamentale est la délimitation de la zone géographique. Cette opération doit être justifiée par des arguments pertinents, par exemple le lien existant entre le produit et son milieu géographique, ou défendables pour des considérations économiques, politiques ou culturelles[8]. Les arguments retenus doivent justifier la typicité et l’originalité du produit. Ils peuvent être des facteurs pédoclimatiques, physiques et naturels, et/ou des savoir-faire localisés. L’essentiel est que ces caractéristiques soient communes, ou en tout cas permettent de différencier la zone de l’IG des zones adjacentes, afin de créer une identité. La correspondance entre la zone de production, de transformation et d’élaboration doit être également établie afin de rendre la zone délimitée cohérente.L’IG « pruneau d’Agen » illustre bien la délimitation d’une zone géographique. L’association interprofessionnelle du pruneau d’Agen définit la zone par des conditions d’ensoleillement adéquates et des sols argilo-calcaires, propices à la culture de la prune d’Ente (variété utilisée pour la fabrication du pruneau d’Agen)[9].

La notion de “terroir”

La notion de « terroir » est difficile à définir car son sens est polysémique et évolutif. D’ailleurs, étant conçu dans un contexte socioculturel bien déterminé, il est extrêmement difficile de traduire dans d’autres langues le mot français «terroir ».

Une approche sensible au besoin d’établir une définition pouvant s’appliquer à plusieurs contextes socioculturels définit le « terroir » comme « un espace géographique délimité dans lequel une communauté humaine construit, au cours de son histoire, un savoir collectif de production fondé sur un système d’interactions entre un milieu physique et biologique et un ensemble de facteurs humains. Les itinéraires sociotechniques ainsi mis en jeu révèlent une originalité, confèrent une typicité, et aboutissent à une réputation pour un bien originaire de cet espace géographique»[10].

La proposition de définition du groupe de travail INRA/INAO [11]est également intéressante : Un Terroir est un espace géographique délimité défini à partir d’une communauté humaine qui construit au cours de son histoire un ensemble de traits culturels distinctifs, de savoirs, et de pratiques fondés sur un système d’interactions entre le milieu naturel et les facteurs humains. Les savoir-faire mis en jeu révèlent une originalité, confèrent une typicité et permettent une reconnaissance pour les produits ou services originaires de cet espace et donc pour les hommes qui y vivent. Les terroirs sont des espaces vivants et innovants qui ne peuvent être assimilés à la seule tradition[12].

Ainsi, les interactions entre le milieu physique et biologique et les facteurs humains produisent au cours de l’histoire, dans des zones géographiques déterminées, des savoir-faire traditionnels. Ces derniers peuvent conférer à la production locale une typicité et une réputation.

Le cahier des charges

Dans certaines juridictions, pour créer une IG, un cahier des charges doit être élaboré et contenir un certain nombre d’ informations concernant le produit en question. L’Union européenne (UE) a développé une expérience importante dans ce domaine. Selon le « Règlement 510/2006 pour la protection des indications géographiques et des appellations d’origine pour les produits agricoles destinés à l’alimentation humaine et les denrées alimentaires », le cahier des charges doit contenir[13]:

-le nom du produit
-description du produit détaillée
-la délimitation de l’aire géographique
-les éléments prouvant que le produit est originaire de l’aire géographique délimitée
-la description de la méthode d’obtention du produit
-les éléments justifiant le lien entre la qualité ou les caractéristiques du produit et le milieu géographique, le lien entre une qualité déterminée, la réputation ou une autre caractéristique du produit et l’origine géographique
-le nom et l’adresse des autorités ou organismes vérifiant le respect des dispositions du cahier des charges, ainsi que leur mission précise
-toute règle spécifique d’étiquetage pour le produit en question

Chaque pays devrait fixer les critères de base pour établir un cahier des charges, selon sa propre conception de l’IG et les besoins des producteurs locaux. Il est évident néanmoins que « les éléments justifiant le lien entre la qualité, les caractéristiques ou la réputation du produit et le milieu géographique » demeurent fondamentaux pour l’identification d’une IG.

 

[1] Le texte des ADPIC est disponible à l’adresse suivante: http://www.wto.org/french/docs_f/legal_f/legal_f.htm

[2] Samper, L.F. (2007) “Café de Colombia: protecting and promoting a well-known origin”, National Federation of Coffee Growers of Colombia, Beijing, Chine, Juin 2007. Silva, G. (2008) “Geographical Indications: The Case of Colombian Coffee”, CEO, National Federation of Coffee Growers of Colombia, mai 2008

[3] Le texte de l’Arrangement de Lisbonne est disponible l’adresse suivante: http://www.wipo.int/treaties/fr/registration/lisbon/ Le texte français de l’Arrangement est le texte authentique. La version anglaise, à l’article 2.1, a été traduite de la façon suivante : « […] quality and characteristcs of which are due exclusively […] » au lieu de « quality ou characteristcs ». Ils’agit d’une erreur de traduction qui a été confirmé par le Secrétariat de l’OMPI

[4] Voir Secretariat de l’OMPI, “Amélioration qui pourraient être apportée aux procédures prévues par l’Arrangement de Lisbonne”[http://www.wipo.int/edocs/mdocs/mdocs/fr/li_wg_dev_1/li_wg_dev_1_2.pdf], p. 13, March 2009.

[5] La Convention de Paris pour la protection industrielle a été conlcue en 1883 et complétée par le Protocole de Madrid de 1891. Voir http://www.wipo.org “Traités”, “Traités de protection de la propriété intelleuelle”, “Convention de Paris”.

[6] L’Arrangement de Madrid de 1891 concernant la répression des indications de provenance fausses ou fallacieuses sur les produits. Voir http://www.wipo.org , « Traités », « Traités de protection de la propriété intellectuelle », « Arrangement de Madrid ».

[7] Barjolle, D., Boisseaux, S., Dufour, M. (1998), « Le lien au terroir, bilan des travaux de recherche », Ecole polytechnique fédérale de Zurich, Institut d’économie rurale, Mai 1998, Suisse

[8] Ibidem

[9] Voir « Le fruit d’un terroir ».

[10] Vincent, E., Flutet, E., Nairaud, D. (2008) « aoc et aop : un système de reconnaissance des terroirs au service du développement durable », Géosciences, numéro 7/8, mars 2008, INAO

[11] Institut national de recherche agronomique (INRA)/ Institut national de l’origine et de la qualité (INAO)

[12] Voir http://terroirsetcultures.frmfrpaca-lr.eu/spip.php?article74

[13] Voir Règlement (CE) No 510/2006 du 20 mars 2006, art.4

 

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